Nestellios est un anglo-arabe cob normand de 6 ans, doté d'une belle liste blanche sur le chanfrin. Il est né en Dordogne et a passé toute sa vie dans un pré non loin des cépages de grands crus Saint Emilion.
Christophe l'a débourré lui-même et l'a initié à la baignade afin de l'habituer à des situations "hors normes". Ce genre d'exercice a permis à mon frère de gagner la confiance absolue de son cheval. Ce qui est primordial pour le bon déroulement du voyage.
Avant le grand départ, pour tester l'équipement, ils ont fait une virée d'une dizaine de jours dans les landes qui se déroula à merveille et qui redoubla leur envie de partir pour de bon.
Quant à moi, je suis illustrateur et mon expérience en matière équestre se résume à quelques leçons lors de mon adolescence, puis en la visite des anciens haras royaux de Strasbourg (construits sous Louis XV) qui abritaient encore, il y a un an à peine, des chevaux de noble ascendance.
Je me fais donc une grand joie de vivre cette aventure au cœur des Pyrénées.
Nous sommes le 31 octobre 2011, notre point de rendez-vous est le sanctuaire de Lourdes, mes compagnons sont sur la route depuis 3 semaines.
Christophe me présente Nestellios "Il est très sociable tu verras ! il ne mords pas, ne botte pas !" C'est un bon début !
Avant de quitter la ville, nous buvons l'eau de la source aux miracles qui a pour le moins la vertu de faire disparaitre la soif ; puis nous passons récupérer du courrier en poste restante et faisons quelques courses. Nestellios est un bon père tranquille, restant calme malgré la circulation automobile. La race des cob normands est à juste titre choisie par la garde républicaine car elle ne s'effraye pas facilement, bien utile pour les fins de match de football, les manifestations, le trafic, etc. Par ailleurs il a un vif succès auprès des jeunes filles assises aux terrasses des cafés.
le lendemain, nous faisons route vers Argeles, dans la vallée du Gave, promenade sans dénivelé, sur des petites routes asphaltées, tout comme la veille le cheval ne montre aucun signe d'énervement au passage des camions. Il a été ferré avec des pointes en tungstène pour prévenir de l'usure sur les routes goudronnées. Il est particulièrement friand des belles touffes d'herbe, des feuilles de savonnier et de sorbier.
Son attitude face aux autres animaux est toujours pacifique, bien qu'il soit "entier" il ne cherche jamais la bagarre (chevaux, ânes, cochons...). Beaucoup de lapins passent par là, Nestellios les regarde les oreilles dressées, peut-être un peu par mimétisme...
La selle s'avère n'être pas tout à fait adaptée, à cause de frictions régulières le garrot du cheval a enflé fortement.
Christophe, lors d'une rencontre le long de l'Adour une semaine auparavant, s'est fait conseiller un sellier spécialiste de la randonnée équestre habitant dans cette vallée. Nous décidons de lui rendre visite.
.
Fort sympathique, au contact chaleureux et ne ménageant pas ses efforts pour nous sortir de ce mauvais pas, Paul le sellier nous apporte, par son savoir-faire et sa perspicacité, une aide considérable. Il propose notamment à Christophe de lui prêter une selle argentine davantage dégarrotée, mieux adaptée au cheval.
Nous restons trois journées dans son chalet au milieu d'une forêt de chataigniers, pendant lesquels Paul remanie l'ensemble de l'équipement : amélioration du pommeau, inclinaison des bandes d'arson, changement de la matelassure, remplacement des fontes, sacoches et charvin...
Le travail de cet artisan est exceptionnel, ces anciennes réalisations sont de vraies oeuvres d'art, à les regarder on entend presque la musique de Sergio Leone !
Lors d'un diner, Christophe, Paul et Béatrice sa femme entretiennent une grande conversation sur l'intérêt de faire "couper" son étalon pour de tels grands voyages. Un cheval "entier" s'il croise d'autres "entiers" cherchera la bagarre. Par ailleurs, un étalon déteste souvent les "hongres" (chevaux castrés) et s'il arrive dans un groupe, préférera s'en prendre à lui avant même d'aller voir les juments. Quant aux juments, lorsqu'il y viendra, il en fera le tri et se gardera les plus belles à son goût. Un étalon qu'on avait "coupé" à l'âge de 15 ans continua à saillir par habitude ! Pour castrer un étalon, le printemps est le bon moment car il ne fait pas froid et qu'il n'y a pas encore de mouches, trois semaines de repos seront nécessaires au cheval pour se remettre d'une telle opération.
Enfin, entre la poire et le dessert, nous apprenons une ultime curiosité : un cheval avec une des deux testicules "non retombée" a un comportement bizarre... donc il faut le "couper" sans hésiter !
Christophe se dit alors que peut être devrait-il faire castrer Nestellios, mais s'en référant au caractère placide et sympathique de l'animal, décide de laisser cette préoccupation de côté.
Les 3 jours qui suivent notre départ de chez Paul sont froids et pluvieux. Comme la météo annonce de la neige à 1500m, nous avons modifié notre itinéraire. Nous nous dirigeons à présent vers l'ouest où le climat océanique est plus doux et où les cols vers l'Espagne vont diminuant d'altitude.
Comme le garrot de Nes' est encore un peu enflammé, nous le déchargeons de quantités d'affaires dont nous assumons le transport. La pluie et l'effort physique ne tarderont pas à nous rendre complétement trempé. Le cadre est superbe, forêts d'automne au sol couvert de feuilles orangers, brouillard massif et ruisseaux abondants. Nous essayons de dégoter une place au sec pour passer les nuits et ainsi pouvoir faire sécher chausses et habits (par ordre de préférance : chez l'habitant, en refuge ou en gîte). Nes' a besoin d'un petit pré pour brouter, d'un appoint d'avoine puis il passe la nuit sous la pluie. Si nous trouvons un box dans une fermer équestre, il y est plus à son aise, mais sa santé est très résistante et me laisse admiratif "Il est né et dort toutes ses nuits à l'extérieur depuis 6 ans, il a l'habitude !" m'explique Christophe.
Enfin le soleil revient ! Les Pyrénées sont magnifiques en ce mois de novembre ! herbe verte, feuillages de feu, troncs blanc des ormes, lointains bleutés et cimes enneigées... Nes' qui est alezan se confond très bien dans ce paysage d'automne. Serait-ce un cheval caméléon ?
Lors de montées un peu longues et difficiles, il est très appréciable d'attraper la queue de Nestellios et de se laisser tirer.
Au col de Louvie nous piqueniquons en observant les vautours fauves qui passent d'une vallée à l'autre déployant leur imposante envergure. Nous apprendrons bientôt que l'unique lieu de nidification de ces rapaces en France se trouve dans cette vallée, la vallée d'Ossau. Au moins 500 couples y vivent ! Le cheval broute la petite herbe du col et sa silhouette se détache majestueusement sur le ciel et les cimes.
Les refuges dans les pyrénées sont très bien entretenus. Il y a systématiquement du bois sec et un point d'eau à proximité. On y trouve quelques habitants : souris, araignées et cloportes. A notre réveil nous observons un isard à une centaine de mètre dans un pierrier. L'isard est une sorte de petit chamois. Puis nous voyons arrivé un petit chien, un basset griffon vendéeen, avec clochette au collier et balise GPS.
Nous appelons son propriétaire avec le numéro inscrit sur le collier. Cette petite chienne maigrelette s'appelle Fany, elle a été perdu il y a 3 jours à une quinzaine de kilomètres de là, lors d'une chasse au sanglier. Nous la redescendons pour la rendre à son maître. Elle est tellement craintive qu'il faut lui bondir dessus pendant sa sieste pour l'attraper !
Lors de la pause repas, nous offrons du riz avec un peu d'huile d'olive à Fany, pendant que Nes' la sniffe avec amusement. La chienne est terrorisée par le cheval, elle fera toute la promenade la queue entre les jambes. Une fois arrivé dans le hamo de Listo, non loin de Larens, le chasseur vient la récupérer et nous offre en guise de remerciement un civet de porc noir façon Bigorre, une terrine de faisan, des rillettes de canard et une bouteille de Jurançon.
Lors du repas qui suit, nous nous tapons sur le ventre de satisfaction et trinquons à la santé de Fany et Nes' !
Cette semaine dans les Pyrénées a été très inspirante pour l'illustrateur que je suis. J'ai pris l'habitude de dessiner debout, de manipuler mes flacons d'encre et mes aquarelles avec adresse, d'emballer systématiquement mes calepins dans un sac plastique pour les protéger de la pluie. Quand Christophe sellait, ce qui prenait un peu de temps, je sortais mes pinceaux ; puis je prenait l'habitude de faire le portrait des gens sur notre route. Par ailleurs mon vocabulaire s'est enrichi d'une vingtaine de mots forts intéressants concernant l'univers équestre.
Aujourd'hui de retour dans mon fief alsacien, je souhaite beaucoup de bonheur à mes deux compagnons, probablement en train de respirer l'air des vallées, des montagnes et de la liberté.
Christophe l'a débourré lui-même et l'a initié à la baignade afin de l'habituer à des situations "hors normes". Ce genre d'exercice a permis à mon frère de gagner la confiance absolue de son cheval. Ce qui est primordial pour le bon déroulement du voyage.
Avant le grand départ, pour tester l'équipement, ils ont fait une virée d'une dizaine de jours dans les landes qui se déroula à merveille et qui redoubla leur envie de partir pour de bon.
Quant à moi, je suis illustrateur et mon expérience en matière équestre se résume à quelques leçons lors de mon adolescence, puis en la visite des anciens haras royaux de Strasbourg (construits sous Louis XV) qui abritaient encore, il y a un an à peine, des chevaux de noble ascendance.
Je me fais donc une grand joie de vivre cette aventure au cœur des Pyrénées.
Nous sommes le 31 octobre 2011, notre point de rendez-vous est le sanctuaire de Lourdes, mes compagnons sont sur la route depuis 3 semaines.
Christophe me présente Nestellios "Il est très sociable tu verras ! il ne mords pas, ne botte pas !" C'est un bon début !
Avant de quitter la ville, nous buvons l'eau de la source aux miracles qui a pour le moins la vertu de faire disparaitre la soif ; puis nous passons récupérer du courrier en poste restante et faisons quelques courses. Nestellios est un bon père tranquille, restant calme malgré la circulation automobile. La race des cob normands est à juste titre choisie par la garde républicaine car elle ne s'effraye pas facilement, bien utile pour les fins de match de football, les manifestations, le trafic, etc. Par ailleurs il a un vif succès auprès des jeunes filles assises aux terrasses des cafés.
le lendemain, nous faisons route vers Argeles, dans la vallée du Gave, promenade sans dénivelé, sur des petites routes asphaltées, tout comme la veille le cheval ne montre aucun signe d'énervement au passage des camions. Il a été ferré avec des pointes en tungstène pour prévenir de l'usure sur les routes goudronnées. Il est particulièrement friand des belles touffes d'herbe, des feuilles de savonnier et de sorbier.
Son attitude face aux autres animaux est toujours pacifique, bien qu'il soit "entier" il ne cherche jamais la bagarre (chevaux, ânes, cochons...). Beaucoup de lapins passent par là, Nestellios les regarde les oreilles dressées, peut-être un peu par mimétisme...
La selle s'avère n'être pas tout à fait adaptée, à cause de frictions régulières le garrot du cheval a enflé fortement.
Christophe, lors d'une rencontre le long de l'Adour une semaine auparavant, s'est fait conseiller un sellier spécialiste de la randonnée équestre habitant dans cette vallée. Nous décidons de lui rendre visite.
.
Fort sympathique, au contact chaleureux et ne ménageant pas ses efforts pour nous sortir de ce mauvais pas, Paul le sellier nous apporte, par son savoir-faire et sa perspicacité, une aide considérable. Il propose notamment à Christophe de lui prêter une selle argentine davantage dégarrotée, mieux adaptée au cheval.
Nous restons trois journées dans son chalet au milieu d'une forêt de chataigniers, pendant lesquels Paul remanie l'ensemble de l'équipement : amélioration du pommeau, inclinaison des bandes d'arson, changement de la matelassure, remplacement des fontes, sacoches et charvin...
Le travail de cet artisan est exceptionnel, ces anciennes réalisations sont de vraies oeuvres d'art, à les regarder on entend presque la musique de Sergio Leone !
Lors d'un diner, Christophe, Paul et Béatrice sa femme entretiennent une grande conversation sur l'intérêt de faire "couper" son étalon pour de tels grands voyages. Un cheval "entier" s'il croise d'autres "entiers" cherchera la bagarre. Par ailleurs, un étalon déteste souvent les "hongres" (chevaux castrés) et s'il arrive dans un groupe, préférera s'en prendre à lui avant même d'aller voir les juments. Quant aux juments, lorsqu'il y viendra, il en fera le tri et se gardera les plus belles à son goût. Un étalon qu'on avait "coupé" à l'âge de 15 ans continua à saillir par habitude ! Pour castrer un étalon, le printemps est le bon moment car il ne fait pas froid et qu'il n'y a pas encore de mouches, trois semaines de repos seront nécessaires au cheval pour se remettre d'une telle opération.
Enfin, entre la poire et le dessert, nous apprenons une ultime curiosité : un cheval avec une des deux testicules "non retombée" a un comportement bizarre... donc il faut le "couper" sans hésiter !
Christophe se dit alors que peut être devrait-il faire castrer Nestellios, mais s'en référant au caractère placide et sympathique de l'animal, décide de laisser cette préoccupation de côté.
Les 3 jours qui suivent notre départ de chez Paul sont froids et pluvieux. Comme la météo annonce de la neige à 1500m, nous avons modifié notre itinéraire. Nous nous dirigeons à présent vers l'ouest où le climat océanique est plus doux et où les cols vers l'Espagne vont diminuant d'altitude.
Comme le garrot de Nes' est encore un peu enflammé, nous le déchargeons de quantités d'affaires dont nous assumons le transport. La pluie et l'effort physique ne tarderont pas à nous rendre complétement trempé. Le cadre est superbe, forêts d'automne au sol couvert de feuilles orangers, brouillard massif et ruisseaux abondants. Nous essayons de dégoter une place au sec pour passer les nuits et ainsi pouvoir faire sécher chausses et habits (par ordre de préférance : chez l'habitant, en refuge ou en gîte). Nes' a besoin d'un petit pré pour brouter, d'un appoint d'avoine puis il passe la nuit sous la pluie. Si nous trouvons un box dans une fermer équestre, il y est plus à son aise, mais sa santé est très résistante et me laisse admiratif "Il est né et dort toutes ses nuits à l'extérieur depuis 6 ans, il a l'habitude !" m'explique Christophe.
Enfin le soleil revient ! Les Pyrénées sont magnifiques en ce mois de novembre ! herbe verte, feuillages de feu, troncs blanc des ormes, lointains bleutés et cimes enneigées... Nes' qui est alezan se confond très bien dans ce paysage d'automne. Serait-ce un cheval caméléon ?
Lors de montées un peu longues et difficiles, il est très appréciable d'attraper la queue de Nestellios et de se laisser tirer.
Au col de Louvie nous piqueniquons en observant les vautours fauves qui passent d'une vallée à l'autre déployant leur imposante envergure. Nous apprendrons bientôt que l'unique lieu de nidification de ces rapaces en France se trouve dans cette vallée, la vallée d'Ossau. Au moins 500 couples y vivent ! Le cheval broute la petite herbe du col et sa silhouette se détache majestueusement sur le ciel et les cimes.
Les refuges dans les pyrénées sont très bien entretenus. Il y a systématiquement du bois sec et un point d'eau à proximité. On y trouve quelques habitants : souris, araignées et cloportes. A notre réveil nous observons un isard à une centaine de mètre dans un pierrier. L'isard est une sorte de petit chamois. Puis nous voyons arrivé un petit chien, un basset griffon vendéeen, avec clochette au collier et balise GPS.
Nous appelons son propriétaire avec le numéro inscrit sur le collier. Cette petite chienne maigrelette s'appelle Fany, elle a été perdu il y a 3 jours à une quinzaine de kilomètres de là, lors d'une chasse au sanglier. Nous la redescendons pour la rendre à son maître. Elle est tellement craintive qu'il faut lui bondir dessus pendant sa sieste pour l'attraper !
Lors de la pause repas, nous offrons du riz avec un peu d'huile d'olive à Fany, pendant que Nes' la sniffe avec amusement. La chienne est terrorisée par le cheval, elle fera toute la promenade la queue entre les jambes. Une fois arrivé dans le hamo de Listo, non loin de Larens, le chasseur vient la récupérer et nous offre en guise de remerciement un civet de porc noir façon Bigorre, une terrine de faisan, des rillettes de canard et une bouteille de Jurançon.
Lors du repas qui suit, nous nous tapons sur le ventre de satisfaction et trinquons à la santé de Fany et Nes' !
Cette semaine dans les Pyrénées a été très inspirante pour l'illustrateur que je suis. J'ai pris l'habitude de dessiner debout, de manipuler mes flacons d'encre et mes aquarelles avec adresse, d'emballer systématiquement mes calepins dans un sac plastique pour les protéger de la pluie. Quand Christophe sellait, ce qui prenait un peu de temps, je sortais mes pinceaux ; puis je prenait l'habitude de faire le portrait des gens sur notre route. Par ailleurs mon vocabulaire s'est enrichi d'une vingtaine de mots forts intéressants concernant l'univers équestre.
Aujourd'hui de retour dans mon fief alsacien, je souhaite beaucoup de bonheur à mes deux compagnons, probablement en train de respirer l'air des vallées, des montagnes et de la liberté.
Bonne continuation !
Hadrien